Il n’y a aucune raison de douter de l’authenticité des comportements des animaux de sa Ménagerie intime, parfois surprenants, que nous décrit Théophile Gautier, de sa plume imagée et souvent amusée. Ceux et celles qui aiment les chats, les chiens, les chevaux (et même les rats ou les caméléons !) trouveront dans ces souvenirs des témoignages qui les raviront et des réflexions qui prouvent que Descartes s’est complètement fourvoyé avec sa thèse des animaux-machines.
Gautier va jusqu’à donner à sa petite chienne le sens de l’art :
« Quoique nous ayons vécu dans la plus profonde intimité avec les bêtes et que nous puissions citer cent traits ingénieux, rationnels, philosophiques, de chats, de chiens, d’oiseaux, nous devons avouer que le sens de l’art manque totalement aux animaux. Nous n’en avons jamais vu aucun s’apercevoir d’un tableau, et l’anecdote sur les oiseaux becquetant les raisins peints par Zeuxis nous paraissait controuvée. Ce qui distingue l’homme de la brute, c’est précisément le sens de l’art et de l’ornement. Aucun chien ne regarde une peinture et ne se met de boucles d’oreilles. Eh bien, Myrza, à la vue du portrait dressé contre le mur par Bonnegrâce, s’élança du tabouret sur lequel elle était roulée en boule, s’approcha de la toile et se mit à aboyer avec fureur, essayant de mordre cet inconnu qui s’était ainsi introduit dans la chambre. Sa surprise parut extrême. »
« Si l’homme n’était pas odieusement féroce et brutal, comme il l’est trop souvent envers les bêtes, comme elles se rallieraient de bon cœur à lui ! Cet être qui pense, parle et fait des actions dont le sens leur échappe, occupe leur pensée obscure ; c’est pour elles un étonnement et un mystère. Souvent elles vous regardent avec des yeux pleins d’interrogations auxquelles on ne peut répondre, car on n’a pas encore trouvé la clef de leur langage… Moins stupides que nous, les bêtes parviennent à comprendre quelques mots de notre idiome, mais pas en assez grand nombre pour causer avec nous. Ces mots se rapportent d’ailleurs à ce que nous exigeons d’elles, et l’entretien serait court. Mais que les animaux se parlent, cela est indubitable. »
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