René Crevel (1900-1935) est un écrivain et poète appartenant au courant dadaïste puis surréaliste.
Cet essai s’inscrit dans le débat de plus en plus violent qui divise les milieux littéraires dans les années vingt, avec la naissance du Surréalisme. L’auteur s’y montre passionné et véhément.
« Qui donc d’ailleurs, durant les premiers lustres de ce siècle, eût prévu à coup de quel vigoureux questionnaire seraient poursuivis les romanciers, benoîtement réalistes ? Le premier qui leur fut porté fut celui de l’enquête menée au lendemain de la guerre, en 1919, par la revue Littérature qui osa demander aux pontifes : Pourquoi écrivez-vous ? […]
Voilà par quelle enquête a débuté la lutte de l’Esprit contre la Raison que devaient poursuivre Dada, l’écriture automatique, le surréalisme. La brusquerie de l’attaque, spontanément, ébranla et jusque dans ses plus profondes et traditionnelles racines l’opportunisme. Du premier coup, la preuve venait d’être faite que toute poésie est une révolution en ce qu’elle brise les chaînes qui attachent l’homme au rocher conventionnel. Déjà voici venir le temps où nul n’osera sans rire se justifier par des raisons formelles et c’est ainsi que le professeur Curtius, dans un récent article sur Louis Aragon, a pu le louer d’« avoir vaincu la beauté, ce prétexte, par l’authentique poésie ». […]
Le poète, lui, au contraire, ne flatte ni ne ruse. Il n’endort pas ses fauves pour jouer au dompteur mais, toutes cages ouvertes, clés jetées au vent, il part, voyageur qui ne pense pas à soi mais au voyage, aux plages de rêves, forêts de mains, animaux d’âme, à toute l’indéniable surréalité. Et voyez son mépris des rocailles, des travestis. Le livre de ses songes, il le lit comme ces leçons de choses où son enfance essaya d’apprendre à connaître l’économie du monde, la marche du temps, les caprices des éléments et les mystères des trois règnes. C’est, en plein ciel, un récit aux couleurs plus persuasives, plus périlleuses que le chant légendaire des sirènes.
Des hommes en d’autres temps avaient la joie de planter des arbres qu’ils appelaient arbres de la liberté. La poésie qui nous délivre des symboles plante la liberté elle-même et son ascension laisse très loin derrière, très bas sous elle, les sons, les couleurs qui l’expriment.
Mais quel technicien comprendra jamais ? »
Jacques-Émile Blanche, Portrait de René Crevel (1900-1935). Musée Carnavalet, Paris.
Bonsoir, Romain,
Vous aussi, comme moi vous êtes parfois victime d’un ordinateur rebelle.
Je souhaite que ce texte vous plaise.
Bonne soirée.
Très chère Domi,
J’étais bien malheureux depuis quelques jours:
mon ordinateur a fait des siennes.
Quel bonheur de vous retrouver !
Vous avez encore déniché un texte particulier…
Merci à vous !