René Boylesve (1867-1926), auteur d’une quarantaine de romans et nouvelles (Le Parfum des îles Borromées, Sainte Marie des Fleurs, Le Bonheur à cinq sous) est resté méconnu, éclipsé par la célébrité de ses amis Anatole France, Henri de Régnier, André Gide, Francis Vielé-Griffin, et Jean Moréas, Charles Guérin, Paul Bourget, Paul-Jean Toulet, Paul Valéry, Maurice Barrès…
Plusieurs de ses romans dont La Becquée (œuvre en partie autobiographique) ont pour cadre la Touraine ; Beaumont n’est autre que sa ville natale La Haye-Descartes et la Courance est le nom d’un petit ruisseau de la propriété familiale. Le personnage central est la grand’tante du petit René Boylesve (il était gosse au moment des événements du récit), dépeinte sous le nom de Félicie Planté (en réalité Clémence Jeanneau), généreuse mais ayant le culte de l’argent et effondrée devant les gaspillages de son beau-frère Fantin…
Roman du sentiment, non seulement vécu, mais décrit en profondeur et art de faire sentir les moments intimes par des descriptions délicates, telle celle-ci, prise au hasard :
« Les heures de la triste saison tournaient au cadran de bronze, sous le corps gracieux du Cupidon. Quand elles sonnaient, ces dames levaient la tête sans interrompre leur ouvrage, et il se trouvait invariablement quelqu’un pour annoncer le nombre des battements du petit marteau. Le feu de bois sec pétillait ; on confiait des châtaignes à la cendre brûlante ; tout à coup cela sentait le roussi : on se levait et secouait ses robes ; ou bien une châtaigne faisait explosion, et tout le monde se mettait debout. On était sensible au souffle du vent, à la moindre goutte de pluie au dehors ; la température était l’objet d’une préoccupation constante, et l’on avait presque des battements de cœur lorsque, le temps s’étant mis à la neige, on épiait, les yeux au ciel sali, la chute tremblotante des premières blancheurs. »
J’ai passé de très belles heures à l’écoute de ce roman ; entre Proust et Nina Companeez.
Comme j’ai aimé ce roman et votre façon
de le lire ! Merci de tout cœur