En novembre 1914, Annie de Pène, journaliste au Matin, se rend sur le front à la frontière belge. Elle en tire trois reportages, regroupés et publiés en 1915 : Vers la Reine, Tranchées et Pervyse. Dans ces textes, Annie de Pène s’amuse d’abord de l’opiniâtreté dont elle a dû faire preuve pour obtenir un laisser-passer, une voiture pour rejoindre le front, un logement pour la nuit. Mais elle y dévoile surtout la brutale réalité de la guerre, les villes transformées en garnison, les dures conditions de vie dans les tranchées, les blessés, les disparus – sa naïveté et son enthousiasme initiaux laissant place peu à peu à la compassion pour les soldats et l’effroi de la canonnade. « Combien sont-ils d’hommes enfournés dans ce boyau, dans ce gouffre ? Deux cents ? Dix mille ? Je serais bien en peine de le dire. Il me semble que leurs ombres mouvantes se multiplient à l’infini. »
Vers la Reine :
Sergueï Rachmaninov, Rhapsodie sur un thème de Paganini, Op.43 – pour deux pianos ; variations 1 et 16, interprété par Shawn Christopher White et Gabriel Antonio Hernandez Romero (licence Cc-Nc-4.0).
Tranchées et Pervyse :
Sergueï Rachmaninov, Étude-tableaux Op. 39 – Lento assai, interprété par Ivan Kivelidi (licence Cc-Nc-4.0).
J’ai adoré vos lectures de Annie de Pène,celle-ci en particulier.
@Sautillant, vous devriez aussi beaucoup aimer La Grande Jeanne d’Édouard Rod, magnifiquement lue par Pomme.
Merci de votre retour, cher Sautillant ! Vous avez raison, je suis très touchée par Annie de Pène, depuis que j’ai « fait sa connaissance », c’est une autrice dont je me sens proche, et c’est sans doute ce que vous avez ressenti dans ma lecture. Les deux textes, Tranchées et Pervyse, m’ont particulièrement émue. J’ai prévu d’autres lectures d’elle, mais j’ai un autre chantier en cours qui m’occupe bien …
Ps
Les notes de RACHMANINOV sont une bonne inspiration…
GAËLLE… J ‘ ai écouté…
Trois courts reportages réalisés alors que la gande boucherie n’ en est qu’ à ses débuts et qu ‘ on s’ imagine sa fin proche… l ‘ épisode des taxis de la Marne ( 107 ème anniversaire aujourd’ hui même ) a dopé le naïf patriote…
Annie de PENE n ‘ est pas une journaliste “embedded ” comme on dit aujourd’ hui… Trois courtes incursions en deçà… sur… et au-delà du front… Trois prises de temperature… elle va… elle voit… et elle raconte aux lecteurs du journal pour le compte duquel elle est en mission… Aucune analyse… de simples témoignages… où la sinistre réalité se fait peu à peu jour… de l ‘ équipée drolatique du bouquet à la Reine de Belgique à l’ hôpital où bras et jambes amputées… gueules cassées… yeux aveuglés… commencent d ‘ affluer… en passant par la grande frousse de notre légère journaliste ( ” Impossible ! Ordre formel !” ) quand elle croit avoir été fourvoyée dans une tranchée ” boche “… Mais non… c’ est bien une tranchée française… où un train-train s ‘ est déjà installé ! On fait mine de plaisanter de la situation… Le jeune gosse qui tient son journal a même des accents d’ APOLLINAIRE s ‘ extasiant sur la beauté des tirs d’ obus dans la nuit (allez savoir… peut-être qu ‘ APOLLINAIRE a lu le témoignage d’ Annie de PENE… et que ça lui a donné des idées… ” Ah Dieu ! que la guerre est jolie ! “)… et notant… les jours de combat… il ne s ‘ est rien passé !
Trois textes intéressants… sans fioritures ni pathos… lus excellement par une GAËLLE qui m’ semble s ‘ identifier de plus en plus au fil de sa lecture… avec l’ auteur dont elle s ‘ est faite la fidèle messagère…
@ LE BARBON… Mon salut !
Pour filer votre métaphore… ne pas oublier que l ‘ expression ” bourrage de crâne “… apparue vers la fin du XIXeme siècle a fait florès pendant la guerre de 14-18… ” Moi mon colon cell’ que j’ préfère c ‘ est la guerre de 14-18 “… l’ humour grinçant de la chanson de BRASSENS…Je vous recommande la lecture de ” Les brigands ” de VILLIERS de L ‘ ISLE ADAM… dont on trouve deux versions sur le site… Une bonne métaphore… à mon avis… de ce que nos yeux écarquillés n’ arrivent pas à croire !
Un sujet très intéressant, merci. J’en dirai plus quand je vous aurai écoutée si le vaccin que je fuis ne m’a pas tué raide.
Je suis de ceux qui trouvent certaines tranchées et certaines guerres sans aucun objet.
Gaëlle en tout cas, « On les aura ».
Merci de votre message, Gilbert, je suis très contente de savoir que les textes d’Annie de Pène intéressent les lecteurs, car je me suis moi-même attachée à cette écrivaine depuis que je l’ai découverte par hasard (il me semble bien grâce à une suggestion de lecture de Cocotte).
Quant à vos propositions de lecture, seul le texte de René Benjamin pourrait être lu ici, les deux autres ne sont pas « assez morts » – si j’ose dire : les droits d’auteur s’appliquent encore, il faut attendre 70 ans après le décès de l’auteur (et de son traducteur) pour que ses textes tombent dans le domaine public. Alors, pour Genevoix et plus encore Jünger, il va nous falloir faire preuve de patience … et ce ne sera certainement pas moi qui vous les lirai !
J’ai jeté un œil rapide à Gaspard, je dois vous avouer que je n’ai pas été très tentée, mais j’espère qu’un autre DDV prendra la balle au bond et vous l’offrira.
Au plaisir de vous retrouver dans d’autres lectures !
Bonjour,
Je garde un bon souvenir de “Confidences de femmes” du même (épicène) écrivain grâce
à votre charmante prestation collective.
Mon plaisir est donc ravivé en la rencontrant à nouveau. Seulement, cette fois-ci l’auteure / autrice a revêtu l’uniforme d’écrivain combattant combinant l’écriture et l’expérience guerrière dans un enjeu à la fois politique, stratégique, militaire, mais aussi humain et psychologique particulièrement important.
Sur un autre plan et dans le cas où la littérature spécifique à cette période de guerre de positions vous tente, il me serait
agréable de vous écouter lire l’un des ouvrages de bonne facture suivants :
*Maurice Genevoix (1890-1980) Nuits de guerre (1917)
*Ernst Jünger (1895-1998) Orages d’acier (1920)
* René Benjamin (1885-1948) – Gaspard (1915) prix Goncourt.
Sans vouloir vous mettre de pression
Chère Claryssandre, toujours fidèle dans votre enthousiasme ! Annie de Pène a écrit de nombreuses chroniques pendant la 1ère guerre mondiale sur la vie à l’arrière publiées régulièrement dans Le Matin, que je lirai également (mais patience … vous savez que je suis une lectrice peu prolifique …).
Celles-ci, écrites au tout début de la guerre, m’ont paru particulièrement touchantes, elles traduisent un certain décalage entre l’illusion d’une guerre courte et facile, et la réalité des tranchées. La naïveté dont fait preuve Annie de Pène était sans doute celle d’une majorité de français a l’époque…
Chère Gaëlle, MERCI pour cette lecture !