Nous sommes en 1865. Chaque fois qu’Alphonse Karr quitte Honfleur où il habite pour un séjour dans la capitale, il est partagé entre l’étonnement et la réprobation. Voici quelques phrases cueillies dans Voyage dans Paris :
« Dans les villes, et surtout à Paris, les logis sont superposés, et les gens logés comme on serre des vêtements dans les différents tiroirs d’une commode. […] Il faut dire que l’usage absurde de cirer les escaliers et les appartements tient à une sotte et impuissante vanité. Cette ridicule habitude coûte par an la vie à trois ou quatre personnes à Paris, cause un nombre infini de fractures et de luxations, sans parler des chutes qui ne sont que douloureuses. […] Par le même progrès, on a bien aplani les chemins qui mènent aux honneurs, aux dignités et au pouvoir ; autrefois, il fallait apprendre les lois, la politique, etc. ; il fallait conquérir une grande réputation d’intégrité ou de capacité : cela excluait assez souvent les niais, les imbéciles, les sots, les ignorants, les fripons, en un mot une notable partie des habitants du pays : … le superflu est devenu tout doucement le nécessaire, le nécessaire est traité comme s’il était le superflu ; on s’en occupe… après… plus tard… quand on a le temps, s’il reste de l’argent. […] Chacun en France, et surtout à Paris, veut paraître plus qu’il n’est ; mais cette passion coûte cher : elle a besoin, pour se satisfaire, que chacun dépense un peu plus qu’il n’a. Cela ruine en totalité tout le monde et n’arrive pas au résultat si ardemment cherché. […] Sous prétexte de protéger certaines industries, on protège en France certains industriels, et cette protection coûte beaucoup trop cher au pays. […] Les hommes ont mis dans la tête de certaines femmes certaines idées d’indépendance qu’elles ont eu la folie d’accepter et de faire accepter aux autres. […] Les bureaux de tabac sont, autant que possible, dans de beaux quartiers, tenus par de jolies filles, qui n’y restent pas longtemps… »
Et ce Voyage dans Paris s’achève par un très long développement inattendu sur le thème : « Croyez-vous au magnétisme ? »
Charles Soulier, Panorama de Paris pris de la tour Saint-Jacques (vers 1865)
Étonnante nouvelle qui nous montre un Paris que les moins de … ans ne peuvent point connaître (le développement sur le magnétisme et ses phénomènes est particulièrement délicieux…).
Merci beaucoup pour cette réjouissante lecture à laquelle votre ton badin et distingué va parfaitement.
😉
®aoul