Paru en 1881, Portrait of a Lady est considéré comme le chef d’œuvre d’Henry James, par la profondeur de ses personnages et la finesse de ses analyses psychologiques. Le roman, par sa trame de mondanités, d’héritages et de demandes en mariage, plaira aux amateurs de l’époque victorienne où toutes les passions, et même la méchanceté, sont bridées par les conventions.
Isabelle Archer est une jeune américaine passionnée, désireuse de vivre pour elle-même, qui considère tous ses prétendants, même les plus charmants, comme des menaces pour sa liberté. Elle définira ainsi sa conception du bonheur : « Une voiture à quatre chevaux qui file vivement par une nuit sombre sur des routes invisibles ».
Lorsque le destin, par l’intermédiaire de son cousin, la dotera de l’indépendance financière qui lui faisait défaut, Isabelle sera paradoxalement mise en danger. Pauvre, elle était entourée d’hommes trop protecteurs. Riche, elle devient la proie des coureurs de dot… Où la mènera donc sa quête éperdue d’indépendance ?
Franz Schubert, Impromptu en sol bémol majeur D. 899 n°3, interprété par Clifford Curzon (1941, domaine public).
J’ai eu grand plaisir à vous écouter parcourir habilement tous les méandres de cette oeuvre complexe, séduisant trompe l’oeil : “notre héroïne” (comme dit l’auteur au début mais plus à la fin) est-elle une victime écrasée par son siècle et par un complot de méchants ? C’est ce que dit le film. Mais le roman ? D’abord une jeune-fille naïve, ignorante mais trop sûre d’elle, son maître mot LIBERTE. Sur ce elle voyage par le monde (sans aucun profit) et on la retrouve avec stupéfaction transformée, par son propre choix, en femme soumise, dissimulatrice, passive. Le mal rôde… Les personnages se taisent (Ralph, Isabel), mentent, manoeuvrent. Le style de l’auteur reflète l’ambigüité des personnages et des situations. Il saute trois ans, hop là. Ses analyses sophistiquées faites à postériori ne nous éclairent pas. Rien de concret, presque aucun fait, une totale absence du corps. On nous dit qu’Isabel a aimé Osmond mais rien ne nous le fait sentir. Il est un dangereux pervers mais en même temps une vraie limace. Que croire ?
La société entière semble corsetée, oisive, futile, dénuée de sentiments, produisant des êtres comme Pansy, véritable marionnette humaine
Pourtant la passion, la souffrance affleurent par éclats sous ce carcan, chez Ralph surtout, mais aussi chez le pauvre Kaspar, chez la démoniaque Merle, même chez Pansy.
Et l’auteur a de l’humour puisque le seul personnage qui échappe à cet écrasant surmoi c’est la miss féministe, défendant ses principes, caricaturée certes, mais finalement seule à accéder à la liberté et au bonheur de l’amour libre
Quant à l’héroïne, on lui souhaite de se bouger un peu…
Je plaisante mais j’ai beaucoup apprécié cette oeuvre, et ceci grâce à vous
Merci, Pauline pour votre interprétation très réussie de cet auteur difficile et passionnant.
Bonsoir Sylve, et merci ! Je me rends compte avec horreur en vous lisant que j’ai beau l’avoir lu dans ma jeunesse, avoir vu le film, l’avoir relu pour Litteratureaudio il y a 10 ans et y avoir passé plus de 20 heures, j’ai malgré tout oublié une bonne moitié des personnages… Dans mon souvenir, Isabel est en effet très ambivalente, à la fois naïve et orgueilleuse, libre et dépendante, gentille et glaciale. Henry James est le maître de l’ambiguïté; la complexité de ses personnages, même dans ses oeuvres courtes, est toujours un plaisir… A bientôt peut-être sur un autre texte de lui que nous allons bientôt traduire !
J’ai commencé avec le plus grand plaisir l’écoute de ce beau roman d’Henry James, très bien mis en valeur par votre voix et votre interprétation. La traduction laisse parfois à désirer et n’est pas à la hauteur de votre traduction de Joyce. C’est normal évidemment.
Par contre je voudrais vous signaler que le chapitre 5 s’arrête en plein milieu et àun momentintéressant !. En lisant les commentaires j’ai cru comprendre que ce défaut avait déjà été signalé et réparé mais en fait il est toujours là.
Ça ne m’empêchera évidemment pas de continuer mon écoute
Chère Sylve, je viens d’écouter : il me semble que le chapitre 5 est complet dans le zip. En revanche, en effet, il semble avoir un problème dans l’accès direct… Je vais regarder ce qu’on peut y faire. En attendant, je vous remercie de votre commentaire. Ce roman est magnifique – et j’ai peur de ne pas l’avoir assez bien servi, avec une qualité technique qui laisse un peu à désirer (j’espère avoir fait des progrès depuis cette époque). La traduction ne m’avait pas choquée à la lecture – et je comprends que vous êtes très exigeante, ce qui rend votre jugement sur ma traduction de Dubliners encore plus précieux !