La Jeunesse blanche, recueil paru en 1886, comprend plusieurs sections dont Premier Amour dont vous pouvez écouter l’intégralité des 15 poèmes. Cet ouvrage a donné la célébrité en France au grand auteur belge George Rodenbach, qui s’accroîtra six ans plus tard avec le chef-d’œuvre symboliste Bruges-la-morte.
« Devant votre maison close dans du silence
Combien je suis allé souvent, par les beaux soirs,
Avec les gestes fous d’un amant qui balance
Ses songes dans le vent comme des encensoirs.
Je n’avais nul espoir de vous voir apparaître ;
Dans vos rideaux à fleurs je vous savais dormant ;
Mais je croyais sentir à travers la fenêtre
Quelque chose de vous m’arriver par moment.
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À peine entendait-on en de lointaines rues
Les pas lourds d’un veilleur ou l’aboiement d’un chien
Et toutes ces rumeurs incessamment décrues
Évoquaient une eau morte où l’on ne voit plus rien.
Et je restais longtemps, debout, sous vos croisées,
Et mes yeux fatigués s’amusaient à saisir
Le caprice des fleurs de fonte entre-croisées
Aux dessins du balcon où montait mon désir.
Et me sachant tout près de vous dans la nuit calme,
J’imaginais qu’un peu de mon âme en émoi
Devait aller vers vous avec un bruit de palme
Et qu’en ce moment-là vous rêveriez de moi ! »
(Nocturne)
Lucien Lévy-Dhurmer, Portrait de Georges Rodenbach (vers 1895).
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