Du Recueil, “Les Oiseaux bleus”
« C’était une chose triste de les voir si chétifs et si pâles, ces enfants vagabonds. Mais un matin, — grandelets déjà, — ils furent très étonnés, en s’éveillant dans l’herbe au pied d’un arbre, de voir qu’ils avaient dormi la bouche sur la bouche ; ils trouvèrent que c’était bon d’avoir les lèvres unies ; ils continuèrent, les yeux ouverts, le baiser de leur sommeil. Dès lors, ils n’eurent plus souci de leur détresse ; cela leur était égal d’être malheureux puisqu’ils étaient heureux ; il n’y a pas de misère aussi cruelle que l’amour est doux. »
« La renommée de tant de richesse et de largesse se répandit si loin qu’elle parvint jusqu’au pays des Fées ; l’une d’elles, — celle qui était apparue en robe de brocart dans la grange ouverte à tous les vents, — forma le projet de rendre visite à ses protégés afin de voir de près le bonheur qu’elle leur avait donné et de recevoir leurs remerciements.
Mais quand elle entra, vers le soir, dans la chambre somptueuse où le duc et la duchesse venaient de se retirer, elle fut étrangement surprise ; car, loin de témoigner de la joie et de la remercier, ils se jetèrent à ses pieds, les yeux pleins de larmes, en sanglotant de douleur.
— Est-il possible, dit la fée, et qu’est-ce que je vois ! N’êtes-vous point satisfaits de votre sort ?
— Hélas ! madame, nous sommes tellement malheureux que nous allons mourir de chagrin si vous ne prenez pitié de nous.
— Quoi ! Vous ne vous trouvez pas assez riches ?
— Nous ne le sommes que trop ! »
Découvrons ce très joli conte… et la magnifique sensibilité de l’auteur.
Pour tous les âges…
Zingara au tambour de basque, par Camille Corot (1865-1870) – Musée du Louvre, Paris
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