VERLAINE, Paul – Poésies

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  • #146225
    VictoriaVictoria
    Participant

      Le Ciel est par-dessus le toit – (Sagesse)


      Le ciel est, par-dessus le toit,
      Si bleu, si calme !
      Un arbre, par-dessus le toit,
      Berce sa palme.

      La cloche, dans le ciel qu’on voit,
      Doucement tinte.
      Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
      Chante sa plainte.

      Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
      Simple et tranquille.
      Cette paisible rumeur-là
      Vient de la ville.

      Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
      Pleurant sans cesse,
      Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà,
      De ta jeunesse ?

      #146226
      VictoriaVictoria
      Participant

        Le Foyer, la lueur étroite de la lampe – (La Bonne chanson)


        Le foyer, la lueur étroite de la lampe ;
        La rêverie avec le doigt contre la tempe
        Et les yeux se perdant parmi les yeux aimés ;
        L’heure du thé fumant et des livres fermés ;
        La douceur de sentir la fin de la soirée ;
        La fatigue charmante et l’attente adorée ;
        De l’ombre nuptiale et de la douce nuit,
        Oh ! tout cela, mon rêve attendri le poursuit
        Sans relâche, à travers toutes remises vaines,
        Impatient mes mois, furieux des semaines !

        #146227
        VictoriaVictoria
        Participant

          Le Piano que baise une main frêle – (Romances sans paroles)


          Le piano que baise une main frêle
          Luit dans le soir rose et gris vaguement,
          Tandis qu’un très léger bruit d’aile
          Un air bien vieux, bien faible et bien charmant
          Rôde discret, épeuré quasiment,
          Par le boudoir longtemps parfumé d’Elle.

          Qu’est-ce que c’est que ce berceau soudain
          Qui lentement dorlote mon pauvre être ?
          Que voudrais-tu de moi, doux Chant badin ?
          Qu’as-tu voulu, fin refrain incertain
          Qui vas tantôt mourir vers la fenêtre
          Ouverte un peu sur le petit jardin ?

          #146228
          VictoriaVictoria
          Participant

            Le Pitre – (Jadis et naguère)


            Le tréteau qu’un orchestre emphatique secoue
            Grince sous les grands pieds du maigre baladin
            Qui harangue non sans finesse et sans dédain
            Les badauds piétinant devant lui dans la boue.

            Le plâtre de son front et le fard de sa joue
            Font merveille. Il pérore et se tait tout soudain,
            Reçoit des coups de pieds au derrière, badin,
            Baise au cou sa commère énorme, et fait la roue.

            Ses boniments, de coeur et d’âme approuvons-les.
            Son court pourpoint de toile à fleurs et ses mollets
            Tournants jusqu’à l’abus valent que l’on s’arrête.

            Mais ce qu’il sied à tous d’admirer, c’est surtout
            Cette perruque d’où se dresse sur la tête,
            Preste, une queue avec un papillon au bout.

            #146229
            VictoriaVictoria
            Participant

              Le Son du cor s’afflige vers les bois – (Sagesse)


              Le son du cor s’afflige vers les bois
              D’une douleur on veut croire orpheline
              Qui vient mourir au bas de la colline
              Parmi la bise errant en courts abois.

              L’âme du loup pleure dans cette voix
              Qui monte avec le soleil qui décline
              D’une agonie on veut croire câline
              Et qui ravit et qui navre à la fois.

              Pour faire mieux cette plaine assoupie
              La neige tombe à longs traits de charpie
              A travers le couchant sanguinolent,

              Et l’air a l’air d’être un soupir d’automne,
              Tant il fait doux par ce soir monotone
              Où se dorlote un paysage lent.

              #146230
              VictoriaVictoria
              Participant

                Mandoline – (Fêtes galantes)


                Les donneurs de sérénades
                Et les belles écouteuses
                Echangent des propos fades
                Sous les ramures chanteuses.

                C’est Tircis et c’est Aminte,
                Et c’est l’éternel Clitandre,
                Et c’est Damis qui pour mainte
                Cruelle fait maint vers tendre.

                Leurs courtes vestes de soie,
                Leurs longues robes à queues,
                Leur élégance, leur joie
                Et leurs molles ombres bleues

                Tourbillonnent dans l’extase
                D’une lune rose et grise,
                Et la mandoline jase
                Parmi les frissons de brise.

                #146231
                VictoriaVictoria
                Participant

                  Mon rêve familier – (Poèmes saturniens)


                  Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
                  D’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime
                  Et qui n’est, chaque fois, ni tout à fait la même
                  Ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend.

                  Car elle me comprend, et mon coeur, transparent
                  Pour elle seule, hélas ! cesse d’être un problème
                  Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
                  Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

                  Est-elle brune, blonde ou rousse ? – Je l’ignore.
                  Son nom ? Je me souviens qu’il est doux et sonore
                  Comme ceux des aimés que la Vie exila.

                  Son regard est pareil au regard des statues,
                  Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
                  L’inflexion des voix chères qui se sont tues.

                  #146232
                  VictoriaVictoria
                  Participant

                    Nevermore – (Poèmes saturniens)


                    Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? L’automne
                    Faisait voler la grive à travers l’air atone,
                    Et le soleil dardait un rayon monotone
                    Sur le bois jaunissant où la bise détone.

                    Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
                    Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
                    Soudain, tournant vers moi son regard émouvant
                    ” Quel fut ton plus beau jour? ” fit sa voix d’or vivant,

                    Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
                    Un sourire discret lui donna la réplique,
                    Et je baisai sa main blanche, dévotement.

                    – Ah ! les premières fleurs, qu’elles sont parfumées !
                    Et qu’il bruit avec un murmure charmant
                    Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées !

                    #146233
                    VictoriaVictoria
                    Participant

                      Un Grand sommeil noir – (Sagesse)


                      Un grand sommeil noir
                      Tombe sur ma vie:
                      Dormez, tout espoir,
                      Dormez, toute envie!


                      Je ne vois plus rien,
                      Je perds la mémoire
                      Du mal et du bien…
                      O la triste histoire!


                      Je suis un berceau
                      Qu’une main balance
                      Au creux d’un caveau:
                      Silence, silence!

                      #142144
                      VictoriaVictoria
                      Participant
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