FLORIAN, Jean-Pierre Claris (de) – Fables

Accueil Forums Textes FLORIAN, Jean-Pierre Claris (de) – Fables

3 sujets de 16 à 18 (sur un total de 18)
  • Auteur
    Messages
  • #146250
    VictoriaVictoria
    Participant

      Le Voyage


      Partir avant le jour, à tâtons, sans voir goutte,
      Sans songer seulement à demander sa route ;
      Aller de chute en chute, et, se traînant ainsi,
      Faire un tiers du chemin jusqu’à près de midi ;
      Voir sur sa tête alors s’amasser les nuages,
      Dans un sable mouvant précipiter ses pas,
      Courir, en essuyant orages sur orages,
      Vers un but incertain où l’on n’arrive pas ;
      Détrempé vers le soir, chercher une retraite,
      Arriver haletant, se coucher, s’endormir :
      On appelle cela naître, vivre et mourir.
      La volonté de Dieu soit faite !

      #142146
      VictoriaVictoria
      Participant
        #146251
        VictoriaVictoria
        Participant

          Les Deux jardiniers


          Deux frères jardiniers avaient par héritage
          Un jardin dont chacun cultivait la moitié ;
          Liés d’une étroite amitié,
          Ensemble ils faisaient leur ménage.
          L’un d’eux, appelé Jean, bel esprit, beau parleur,
          Se croyait un très grand docteur ;
          Et Monsieur Jean passait sa vie
          A lire l’almanach, à regarder le temps
          Et la girouette et les vents.
          Bientôt, donnant l’essor à son rare génie,
          Il voulut découvrir comment d’un pois tout seul
          Des milliers de pois peuvent sortir si vite ;
          Pourquoi la graine du tilleul,
          Qui produit un grand arbre, est pourtant plus petite
          Que la fève qui meurt à deux pieds du terrain ;
          Enfin par quel secret mystère
          Cette fève qu’on seme au hasard sur la terre
          Sait se retourner dans son sein,
          Place en bas sa racine et pousse en haut sa tige.
          Tandis qu’il rêve et qu’il s’afflige
          De ne point pénétrer ces importants secrets,
          Il n’arrose point son marais ;
          Ses épinars et sa laitue
          Sechent sur pied ; le vent du nord lui tue
          Ses figuiers qu’il ne couvre pas.
          Point de fruits au marché, point d’argent dans la bourse ;
          Et le pauvre docteur, avec ses almanachs,
          N’a que son frère pour ressource.
          Celui-ci, dès le grand matin,
          Travaillait en chantant quelque joyeux refrain,
          Béchait, arrosait tout du pêcher à l’oseille.
          Sur ce qu’il ignorait sans vouloir discourir,
          Il semait bonnement pour pouvoir recueillir.
          Aussi dans son terrain tout venait à merveille ;
          Il avait des écus, des fruits et du plaisir.
          Ce fut lui qui nourrit son frère ;
          Et quand Monsieur Jean tout surpris
          S’en vint lui demander comment il savait faire :
          Mon ami, lui dit-il, voici tout le mystère :
          Je travaille, et tu réfléchis ;
          Lequel rapporte davantage ?
          Tu te tourmentes, je jouis ;
          Qui de nous deux est le plus sage ?

        3 sujets de 16 à 18 (sur un total de 18)
        • Vous devez être connecté pour répondre à ce sujet.
        Veuillez vous identifier en cliquant ici pour participer à la discution.
        ×