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- 8 mai 2008 à 19h07 #146158
« LA RUCHE AUX MOTS »
7.
Malgré son allure placide et souvent désinvolte, le bon Cornélius en intimidait plus d’un. Il faisait partie intégrante du mobilier d’une des plus célèbre librairie du pays picard. Etait-ce à Compiègne, à Abbeville, Creil ou Albert ? A moins que ce ne fut tout bonnement à Amiens, je ne sais plus. J’ai tant voyagé, que tout se mélange. Mais ce qui est sur, c’est que la librairie de madame Labeille, que les habitués appelait Fabiche, était renommée et très courue par les esprits curieux. Car on pouvait y trouver l’introuvable, en matière de livre, et que si on ne l’y trouvait pas, on ne l’y trouverait nulle part ailleurs. Extérieurement, la boutique ne payait pas de mine. Je veux dire qu’elle n’avait pas le style ultra-moderne aux grandes vitrines de verre du sol au plafond ceinturées de néons colorés et flamboyants, et de plaques glacées et scintillantes de paillettes irisants des supports noirs et des étagères d’une blancheurs éblouissantes. Non, rien de tout cela.8 mai 2008 à 19h10 #1461598.
La devanture avait conservé son style « Belle Epoque », centenaire, en bois, plaqué sur les piliers de pierre de l’immeuble, encadrant une vitrine haute soutenue par un épais panneau de chêne massif, flanquée à sa gauche d’une porte qui secouait une clochette au tintement aigrelet quand on la poussait. Tout ce bois extérieur était proprement repeint d’un orangé pâle tirant sur le jaune, donnant l’aspect du miel. Le coffrage, qui camouflait le rideau de fer pour la fermeture et le store pare-soleil ainsi que leurs mécanismes respectifs auxquels madame Labeille avait fait adjoindre un moteur électrique remplaçant l’ancienne manivelle, supportait ce nom célèbre représenté par une belle calligraphie soignée, noire et italique : « La Ruche Aux Mots ». L’allure surannée de la boutique la rendait presque anachronique au milieu du mobilier urbain neuf qui ornait les trottoirs et la petite place ombragée par queLques tilleuls survivants d’une époque où les maires étaient plus soucieux d’offrir de l’ombre à leurs administrés que d’implanter des parkings payants sur le moindre espace non lucratif. Autour de la place, fleurissaient donc piquets, barrières d’acier interdisant les stationnements illicites, poubelles au design recherché, abribus publicitaires, bancs publics plastifiés inaltérables aux intempéries, et surtout le grand panneau électronique central diffusant les annonces locales et municipales, fierté du premier citoyen de la commune. Dans ce décor, la librairie se découvrait avec un air « tendance » prisé des jeunes et un air « rétro » attirant les moins jeunes en mal de nostalgie.8 mai 2008 à 19h13 #1461609.
L’intérieur du magasin était fidèle à sa réputation. Même la patronne ignorait combien de titres étaient disponibles. Dès l’entré, apèrs l ‘escalade d’un seuil de deux marches, des présentoirs à tourniquet tendaient des casiers en forme d’alvéoles aux clients que l’oisiveté ennuyait et qui espérait trouver un apaisement à leurs pensées vagabondes agressées de soucis quotidiens. Policiers, suspenses, science-fictions, romans à l’eau de rose, histoires drôles ou fantastiques, livres érotiques et recueils de mots croiés, tout cela se mélangeait sans vergogne au gré de l’humeur des fouilleurs qui voulaient tromper leurs angoisses pendant une heure ou deux. Le choix facile. Vite payé. Vite lu. Ce genre de client revenait souvent comme drogué par un oubli de soi passgé et trop court, empreint de la soif insatiable d’un plaisir éphémère.
8 mai 2008 à 19h15 #146161
10.
Les mordus du style, de l’auteur de talent ou à succès se jetaient sur les rayonnages accrochés au mur, chargé d’ouvrages de collections au format de poche. Sans respect des collections éditoriales, madame Labeille classait tous les titres par auteur, rendant aini la recherche plus aisée en lisant les noms et les titres sur les tranches des bouquins. Au pied des murs se trouvaient des sortes de comptoirs bas allongés comme des banquettes aux casiers pleins d’albums de bandes déssinées et sur le plan du dessus s’étalaient les dernières nouveautés, comme celles primés au Salon d’Angoulème. Sur le mur d’en face à droite de l’entrée, les rayonnages étaient du même genre, en bois, mais avec un intervalle différents permettant la présentation des éditions originales aux formats habituels. En bas s’étendaient les plus grands livres, concernant l’art, pictural ou photographique, les atlas, les encyclopédies, les documents richement illustrés sur la vie des animaux ou des grands hommes, les sports… L’espace entral était scindé en trois allées bordées par quelques gondoles, proposant pêle-mêle des guides pratiques, de petits jeux de sociétés, des jeux de cartes, des livres pour enfant, et aussi, par une grande table sur tréteaux proposant les best-sellers et les découvertes de nouveaux auteurs, choisis par Fabiche Labeille elle-même, indifférente aux modes des salons parisiens.
8 mai 2008 à 19h17 #146162
11.
Si madame Labeille dirigeait le commerce, Cornélius en était le gardien. Au connu que la librairie et sa propriété, d’apparence placide et nonchaland, il intimidait pourtant les clients qu’il fixait d’un œil rond et inquisiteur. Ses moustaches semblaient former une parabole à l’avant de sa tête, comme pour amplifier son flair à sonder les moindres faits, gestes et intentions de ce qui se passait devant lui. Quand il marchait droit devant lui avec souplesse, chacun s’écartait avec respect comme si ce fut le seigneur des lieux. Malgré sa petite taille, Cornélius paraissait grand. Quand il entrait ou sortait de la librairie silencieusement, il y avait toujours quelqu’un pour lui tenir la porte.
8 mai 2008 à 19h19 #14616312.
Mais un jour, un drame affreux survint. Lors de l’entrée fracassante d’un jeune distrait pénétra dans la boutique chaussé de ces patins à roulettes modernes, qu’on appelle rollers et dont les quatre roues se suivent. Cornélius avait la phobie de la roue, quelqu’en fut la taille. Sursautant, horrifié, il se mit à courir vers l’arrière-boutique, pertubant l’équilibriste. Celui-ci fit un vol plané en battant l’air de ses bras, accrocha un présentoir, qui s’éffondra près de lui en lui jetant un ouvrage sur le crâne. Madame Labeille accourut. Le jeune homme se releva, rouge et confus, une bosse sur la tête et le livre à la main. Elle l’obligea à s’asseoir pour s’assurer qu’il n’avait rien de grave, lui posa une compresse alcoolisée sur la bosse, en s’excusant pour la maladresse de Cornélius. Le client était désolé et tint à acheter le livre. A la caisse il tendit un jeu de carte. Etonnée, la librairie choisit la carte bancaire en se demanda s’il allait se rappeler du code. Le jeune homme lut le numéro de compte sur la carte, en extraya la racine cublique avant de la multiplier par la fraction de seconde en suivant la tangente de ses rollers.
Fabiche était éberluée. Quand le client fut parti, elle s’adressa à Cornélius :
« Quand même, il était charmant ce jeune homme ! »
Cornélius n’approuva pas.
8 mai 2008 à 19h49 #146164Où allez-vous chercher tout ça ?
C’est toujours bien écrit, je reconnais à peu près à qui font référence les personnages…
… Mais je me demande bien où tout cela va nous mener ?
Faut arrêter de fumer la moquette Hervé, i’ va pu en rester !!! (non, j’rigole !)10 mai 2008 à 11h28 #146274- oû allons-nous?
ben, Mister et balle de golf ! “ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire la grimace.. heu non,
comment dirait Armelle ? peut-être :
” Ce n’est pas à un vieux crabe, qu’on apprend le suce-pince !”
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heureusement, j’ai pas de moquette, mais du lino.. ha ha ha.. je me gausse.10 mai 2008 à 11h39 #146277
Chers lecteurs
Ceci est un forum, dont le sujet réel est le livre, sous toutes ses formes. il vous est donc loisible d’intervenir quand vous le souhaitez, même pour vous défouler si vous en ressentez le besoin.
a bientôt. Amicalement à tous.
Hervé
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p.s: vous pouvez me tutoyer, ca me rajeunit (sourire), et puis, il faut vivre avec son temps !!!10 mai 2008 à 13h10 #146282Eh bien Hervé, j’attends la suite de votre histoire avec une grande impatience !
En fait, c’est le jeune homme “chaussé de ces patins à roulettes modernes, qu’on appelle rollers” qui m’intrigue…
Bonne fin de semaine, et merci pour votre humour et votre joie de vivre !10 mai 2008 à 18h52 #146288Hé hé hé.. le jeune homme en rollers? tiens donc..
Ne fume pas trop, mon cher, tu risques d’avoir des hallucinations !
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Voici la suite !10 mai 2008 à 19h11 #146290
Troisième épisode
LA FIOLE DU DOCTEUR TYPHON !
- 13.
De retour chez lui, le Professeur Trognon jeta son livre sur son bureau, et retourna vers l’entrée, pour retirer ses rollers. Il fila dans la salle de bain, histoire de se refaire une santé, en utilisant le principe d’Archimède pour détendre ses pieds doulourement gonflés.
Dans son petit appartement parisien, il vivait éloigné de ses racines normandes. Ses parents avaient tenté de le pousser vers des études sophistiquées qu’eux-même n’avaient pu bénéficier. Comme son père, ancien charpentier de marine, qui avait vu disparaître les navires en bois, il aimait les les voiliers, la physique des fluides, astrophysiques et les points cardinaux. Pour faire plaisir à sa mère pharmacienne, il avait passé sa thèse en chimie organique. Cela répondait à une exigence testamentaire de son arrière grand-père maternel : le Docteur Typhon. Ce dernier, comme de nombreux savants de son temps, ne s’était pas cantonné à la recherche médicale. La culture humaniste déclenchait chez tous ces personnages un besoin de connaissance dans les domaines.
10 mai 2008 à 19h28 #146293
14.
La conséquence de ces études pluridisciplinaires avait conféré à Périn Trognon, le titre prestifieux de professeur émérite et l’estime de ses collègues chercheurs. Outre la gloire, il recueillit aussi le cadeau testamentaire du docteur Typhon, que le notaire lui remit avec d’infinies précautions. On est jamais trop prudent. Le docteur Typhon avait des relations le redouté Alfred Nobel, inventeur de la dynamite.
En fait, on ignorait ce qu’était devenu cet aîeul. Il avait disparu tout simplement. Comment ? Quand ? Où ? Pourquoi ? Toutes ces questions étaient restées sans réponse au grand désespoir de sa femme et de sa descendance. Mais ce qui avait intrigué le plus, est le fait qu’il avait peu de temps avant qu’on s’aperçoive de cette absence, un acte testamentaire avec la mise en dépôt chez un notaire de ses amis, ancien camarade de lycée, en qui il avait toute confiance.
Quand Pépin avait ouvert la boite, il tourva une lettre posée sur une grosse masse compacte de ouate, qui protégeait une fiole. Il décacheté le pli et commença à lire :
10 mai 2008 à 19h37 #146294
15.
« Toi qui me lit, j’espère que tes compétences sont suffisantes pour comprendre ce qui a pu m’arriver. Dans le doute, abstient-toi d’utiliser ce qui reste du résultat de mes travaux sur les différents types de sirop.
Mes dernières recherches portaient sur le rajeunissement des organismes vivants. Je crois avoir trouvé la bonne formule. Seulement, elle n’est pas stable. Car, après la cure de rajeunissement, les souris se remettent à vieillir et il m’a semblé qu’elle vieillissaient encore plus vite.
J’ai donc réalisé un élixir encore plus puissant enrichi d’une molécule d’un conservateur puissant. Les premiers résultants sont étgranges. Les sujets (végétaux ou animaux) disparaîssent totalement sans résidus, sans trace, comme s’ils n’avaient jamais existés. Je n’ai donc plus le choix. Je dois essayer le sirop pour savoir ce qui se passe. J’ai foi dans l’avenir et j’espère que vous arrriverez à me faire revivre grâce aux travaux les plus récents.
Bonne chance et merci
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Docteur Zéphir Typhon
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N.B. : une seule goutte suffit ! »
10 mai 2008 à 19h45 #146296
16.
Grand sceptique, Pépin avait souri, regardé la fiole et son étiquette au style écolier d’autrefois. Il admira l’inscription violette faite à la plume que la boîte avait protégée de la lumière : SIROP TYPHON.
Il avait rangé la boîte dans le coffre-fort où il rangeait se travaux les plus confidentiels craignant le vol intellectuel ou la risée des confrères suivant le type de recherche menée, pas toujours très orthodoxe.
Car comme tout chercheur de très haut niveau qui se respecte et malgré son esprit entraîné à éviter les obstacles épistémologiques, il avait « le défaut », l’idée fixe : l’ouest.
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