APOLLINAIRE, Guillaume – Lettre-poème
Beaux fruits défendus
Paradis perdu
Vase ou toute fleur
Meurt avec bonheur
Jonchée de pétales
De rose hivernale
O blondeur d’abeille
Volant au soleil
Fille-fleur o reine
Des clartés sereines
Vos cheveux qui sont
Tels des scorpions
Ont tué mon cœur
Pour vous faire honneur
Dans ma litanie
Moi je vous bénis
Vierge au Zodiaque
Je suis un peu braque
Puisque je suis fou
D’une qui s’en fout
Qui en aime un autre
Et …
Pendant que sous le ciel
Je tiens la chandelle
Mes pauvres yeux sont pleins de vous
Comme un étang de clair de lune
Et je vous prie à deux genoux
O blonde qui paraissez brune
—————————————————
APOLLINAIRE, Guillaume – Le Jupon
Bonjour Germaine Vous avez un beau jupon
Un beau jupon de reine et de reine cruelle
Que j’en tâte la soie Une soie du Japon
Qu’orne un large volant d’ancienne dentelle
Cette cloche de soie où le double battant
De vos jambes tinta le glas de mes caprices
J’en sonne ma Germaine le sein haletant
Et les mains appuyées sur vos hanches complices
Votre chambre ma cloche est un charmant clocher
Où mes mains sur la soie déchirent mes oreilles
Les patères gibet des jupons accrochés
Balancent des pendus soyeux qui m’émerveillent
Immobile comme un hibou la lampe veille
Deux poèmes extraits du recueil Le Guetteur melancolique.