Hymne à la bicyclette, ce court roman, publié en 1898, de celui qui n’était pas encore le créateur des Arsène Lupin, Voici des ailes raconte le voyage à vélo improvisé par deux jeunes couples amis de la bourgeoisie parisienne décidés à prendre l’air de la campagne normande grâce à la merveilleuse invention de la bicyclette.
« Ils allaient. Ils allaient. La folie du mouvement les exaltait. Ils se sentaient des êtres surnaturels, doués de moyens nouveaux et de pouvoirs inconnus, des espèces d’oiseaux dont les ailes rasaient la terre et dont la tête ardente planait jusqu’au ciel… Leur conscience s’évanouit, dissoute dans les choses. Ils devinrent des parcelles de la nature, des forces instinctives, comme des nuages qui glissent, comme des vagues qui roulent, comme des parfums qui flottent, comme des bruits qui se répercutent… »
Au guidon de leur vélocipède, les deux couples A et B goûtent une vie ensauvagée, affranchie et intensifiée, si bien qu’à la fin A devient l’amant de la femme de B et B l’amant de la femme de A. Le vélo leur a permis d’oublier conventions, faux-semblants, et entraves mutilant leur existence.
Attention ! Ce Maurice Leblanc drôle, léger, impertinent, au style maniéré, divise son récit en chapitres aux titres suggestifs et symboliques : ni religion ni cathédrales dans les chapitres I et III, par exemple…
Avant les “Arsène Lupin”, il y eut donc les “obscènes rupins” … Et encore merci à René Depasse !