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CHAPITRE 16 (DEUXIEME PARTIE) : LES MONTRES ET LES CHAINES :
Le bijoutier
Chaînes de cou ou chaînes de gilet ?
Alcide
Chaînes de gilet. (Bas à Frédéric) Parle donc, imbécile ; on te regarde.
Frédéric (timidement)
Chaînes de gilet.
Le bijoutier
Voilà, messieurs. En voici en argent…
Alcide les repousse.
Le bijoutier
En voici en argent doré.
Alcide repousse encore.
Le bijoutier
En voici en or.
Alcide
À la bonne heure. Choisis, Frédéric, il y en a de très jolies.
Ils en prirent quelques-unes, les laissèrent et les reprirent plusieurs fois. Le bijoutier ne les perdait pas de vue ; l’air effronté d’Alcide et la mine troublée, effarée de Frédéric lui inspiraient des soupçons. « Ça m’a tout l’air de voleurs », pensait-il.
Alcide
Choisis donc celle qui te plaît, Frédéric ; veux-tu celle-ci ?
Alcide lui en présenta une. Frédéric la prit en disant : « Je veux bien » d’une voix si tremblante, que le bijoutier mit instinctivement la main sur ses bijoux et les ramena devant lui.
Le bijoutier
Vous savez, Messieurs, que les bijoux se payent comptant.
Alcide
Certainement, je le sais. Combien cette chaîne ?
Le bijoutier
Quatre-vingts francs, Monsieur.
Alcide jeta sur le comptoir quatre pièces de vingt francs.
Alcide
Voilà. Et celle-ci ?
Le bijoutier (avec une politesse marquée)
Quatre-vingt-cinq francs, Monsieur…
…répondit le bijoutier avec une politesse marquée.
Alcide
Voilà.
Il voulut tirer sa montre pour la rattacher à la chaîne, il ne la trouva plus ; elle était disparue. Il eut beau chercher, fouiller dans tous ses vêtements, la montre ne se retrouva pas.
Le bijoutier
Vous avez été volé, Monsieur ? Soupçonnez-vous quelqu’un?
Alcide (d'une voix tremblante)
Au théâtre, j’étais entre deux jeunes gens qui m’ont fait mille politesses, et auxquels j’ai donné, sur leur demande, l’heure de ma montre.
Le bijoutier
Il faut aller porter plainte au bureau du commissaire de police, Monsieur.
Alcide
Merci, Monsieur ; viens, Frédéric.
Frédéric, voyant la figure consternée de son ami, saisit avec bonheur l’occasion de se débarrasser de sa montre.
Frédéric
Tiens, prends la mienne, Alcide, je n’y tiens pas
Alcide (avec surprise)
La tienne ? Et toi donc ? Que feras-tu de ta chaîne ?
Frédéric
Prends-la avec la montre, que le bijoutier a accrochée après. Prends, prends tout ; tu me rendras service.
Alcide
Si c’est pour te rendre service, c’est différent. Merci ; je la garde en souvenir de toi.
Frédéric
Vas-tu porter plainte ?
Alcide
Pas si bête ! pour ébruiter l’affaire et me faire découvrir ! Il faudrait donner mon nom, le tien, celui de l’horloger. On me demandera où j’ai pris l’or pour payer les montres, et tout serait découvert. Les coquins ! Ils avaient l’air si aimables !