(N) AHIKAR – Le Pin Nain

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7 sujets de 1 à 7 (sur un total de 7)
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  • #143686
    AhikarAhikar
    Participant
      #155262
      AhikarAhikar
      Participant

        Bonjour,

        Je vous soumets un texte en espérant qu'il rencontrera votre approbation.

        Bien amicalement,

        Ahikar

         

        Le pin nain

         

        À Varlam Chalamov

         

         

         

         

        Lorsqu’il se redressait, soulevant l’épaisse couche de neige qui le recouvrait, c’était normalement pour annoncer la fin de l’hiver polaire. Nous étions en Sibérie dans la région de Kolyma, où poussait le pin nain. Normalement ici il n’y avait pas d’homme. Il faisait beaucoup trop froid. Jusqu’à moins soixante degrés.

        Et pourtant, depuis quelques années, des cargaisons entières d’hommes avaient été déversées ici, comme des surplus d’humanité, des gens auxquels on n’accordait plus le droit de vivre, des gens qui venaient ici uniquement pour mourir. Car à Kolyma on ne vivait pas, on ne faisait qu’y mourir. Les prisonniers pouvaient bien parfois entendre battre leur cœur dans leur poitrine, mais cela n’était qu’une illusion, car tous se savaient déjà morts depuis longtemps : Kolyma, capitale du Goulag était l’Enfer sur Terre.

        Un groupe d’hommes avait allumé un grand feu, avec du bois ramassé par les détenus. Ils étaient assis en rond autour du feu, avec chacun son fusil à côté de soi. Pendant qu’ils buvaient une sorte de café chaud dans des tasses en métal, les détenus eux travaillaient à peine une centaine de mètres plus loin, à l’abattage d’une mine par un froid qui ce matin atteignait moins cinquante degrés Celsius. Ils étaient ce qu’on appelle des « crevards », c’est-à-dire des hommes qui n’en avaient plus pour longtemps. Après quelques semaines de travail à l’abattage d’une mine, n’importe quel homme vigoureux devenait un « crevard ». Et pendant que ces hommes s’efforçaient de briser la pierre gelée pour atteindre les quotas imposés, faute de quoi ils n’avaient pas à manger, d’autres hommes en habits de surveillant et représentant les autorités gouvernementales, buvaient tranquillement leur tasse de café chaud autour du feu.

        Mais ce matin le pin nain s’était réveillé, la chaleur du feu l’avait fait sortir de son long engourdissement hivernal. Lui qui passait l’hiver aplati contre le sol sous la neige, soudain avait redressé son tronc pour se relever et étirer ses branches. Pour lui c’était le printemps !

        Mais bien vite il sentit que quelque chose n’allait pas. Bien vite il eut l’intuition d’une supercherie. Bien vite il comprit que ce n’était là que le feu trompeur des hommes, que le feu allumé par les Gardiens de l’Enfer.

        Les branches de l’arbre se mirent alors à hurler : – Nous sommes encore en plein hiver polaire ! Oui en plein hiver polaire !

        Et l’arbre tout entier, son tronc, ses branches, comme si d’un seul coup il venait de comprendre que l’Enfer était sur terre et nulle part ailleurs, que l’Enfer c’était les Autres, s’écria : – Ah ! mais dans quel monde me suis-je donc réveillé ! Oui, sur quelle réalité me suis-je donc ouvert !

        Et ses branches continuaient à hurler, comme si le feu et le froid s’étaient unis pour le détruire, comme si le feu des hommes ne l’avait réveillé que pour le livrer aux morsures du froid.

        Quelques instants plus tard, un des hommes qui était toujours assis autour du feu, et toujours en train de boire une sorte de café chaud dans une tasse en métal, se leva pour se dégourdir un peu les jambes. Il marcha jusqu’au pin nain. Là-dessus, il déboutonna sa braguette et se mit à arroser le tronc de l’arbre. C’est alors qu’il crut entendre une plainte, des gémissements, qui semblaient venir de l’arbre. Il s’empressa de reboutonner sa braguette, et s’en retourna vers ses collègues pour leur raconter ce qu’il avait cru entendre.

        Mais quand quelques minutes plus tard, ils voulurent eux aussi entendre ces gémissements, le pin nain venait juste de se recoucher dans la neige, et ce, avant même que le feu ne soit éteint.

        Il faisait froid, très froid. Le thermomètre devait avoisiner les moins cinquante degrés Celsius…



        #155280
        BBarry Sheene
        Participant

          O



          Cher(e) Barry Sheene,
          Merci pour votre vote !
          Les votes étant réservés aux donneurs de voix du site, il ne peut être comptabilisé – merci cependant d'avoir pris intérêt au texte proposé !

          Bien amicalement,

          Carole

          #155308
          Augustin BrunaultAugustin Brunault
          Maître des clés

            N

            #155310
            AegidiusAegidius
            Participant

              C'est assez bien rédigé et ponctué, malgré à mon avis quelques petites améliorations possibles, mais on ne voit pas trop où vous voulez en venir : faut-il comprendre qu'on ne peut pas uriner dehors à moins cinquante degrés pour des raisons de gel immédiat ?

              Le sous-entendu est éventuellement recevable dans un texte de plus grande ampleur mais un écrit très court, comme c'est le cas ici, devrait être beaucoup plus direct, surtout en l'absence de conclusion qui laisse le lecteur dans une sorte d'indécision.

              Pourquoi ne pas proposer quelque chose de plus consistant et de plus clair quant à vos motivations ?

              Bien à vous

              #155311
              AhikarAhikar
              Participant

                Bonjour,

                Ayant été profondément marqué par les Récits de Kolyma de Varlam Chalamov qui a passé 17 ans au Goulag, j’avais voulu lui rendre hommage par ce texte, car malheureusement, pour des raisons de droits, il faudra attendre encore plusieurs décennies avant de pouvoir en proposer une lecture sur le site.

                Je vous donne ci-dessous le texte Le Pin Nain de Varlam Chalamov, qui permettra peut-être une meilleure compréhension de ma démarche.

                 

                LE PIN NAIN

                 

                Dans l'Extrême-Nord, là où la taïga rejoint la toundra, parmi les bouleaux nains, les buissons bas des sorbiers couverts de grosses baies jaune clair et aqueuses, parfaitement inattendues, et les mélèzes vieux de six cents ans qui n'arrivent à maturité qu'au bout de trois cents ans, il y a un arbre spécial : le pin nain. C'est un lointain parent du cèdre, un conifère : un arbuste à feuilles persistantes avec un tronc plus gros que le poing et long de deux ou trois mètres. Il se contente de peu et pousse les racines accrochées dans la moindre fente du versant montagneux rocailleux. Il est vaillant et têtu comme tous les arbres du Nord. Il a une incroyable sensibilité.

                L'automne s'attarde, la neige et l'hiver devraient déjà être là. Des nuages bas, bleu sombre, comme pleins d'ecchymoses, défilent depuis de longues journées au bord de l'horizon tout blanc. Et aujourd'hui, au matin, le vent pénétrant de l'automne est devenu d'un calme menaçant. Est-ce un présage de neige ? Non, il ne neigera pas. Le pin nain ne s'est pas encore couché. Et les journées s'écoulent, il n'y a pas de neige, les nuages vagabondent quelque part derrière la montagne, un petit soleil pâle s'est levé dans le ciel immense et c'est toujours l'automne…

                Mais le pin nain se recourbe. De plus en plus bas, comme sous un fardeau infini, sans cesse grandissant. Il égratigne la pierre de son faîte et se presse contre terre en écartant ses pattes d'émeraude. Il s'aplatit. Il ressemble à une pieuvre avec des plumes vertes. Et, couché, il attend un jour ou deux ; le ciel blanc déverse enfin une neige poudreuse et le pin nain s'enfonce dans son hibernation comme un ours. La montagne blanche se couvre de grosses ampoules neigeuses : ce sont les arbustes de pin nain couchés pour l'hiver.

                Et à la fin de l'hiver, quand la neige recouvre encore la terre sur une épaisseur de trois mètres, quand les tem­pêtes ont tassé dans les gorges une neige dure qui ne peut être entamée qu'au fer, les hommes attendent en vain les signes avant-coureurs du printemps, bien que c'en soit déjà l'époque selon le calendrier. Mais la journée ne se distingue en rien d'un jour d'hiver : l'air est coupant et sec et ne diffère en rien de celui de janvier. Heureusement, les sensations de l'homme sont trop faibles et sa perception trop simple ; d'ailleurs, il n'a pas beaucoup de sens, il n'en a que cinq, ce qui est tout à fait insuffisant pour la prédiction et la divination.

                La nature est plus fine que l'homme dans ses sensations. Nous en savons quelque chose. Songez aux poissons de l’espèce des saumons qui ne viennent frayer que dans la rivière où a été pondu l'œuf qui leur a donné naissance. Songez aux routes mystérieuses des migrations d'oiseaux. Les plantes et les fleurs baromètres sont pléthore.

                Mais voilà que dans la blancheur neigeuse infinie, dans 1'entière désespérance, se dresse soudain le pin nain. Il secoue la neige de sa ramure, se redresse de toute sa hauteur et lève vers le ciel ses aiguilles vertes, givrées, à peine roussies. Il entend l'appel du printemps qui ne nous est pas perceptible et, lui faisant confiance, il se redresse, le premier de tous dans le Nord. L'hiver est terminé.

                Il peut se produire autre chose : un feu de camp. Le pin nain est trop confiant. II déteste tant l'hiver qu'il est prêt à croire en la chaleur d'un feu de camp. Si l'on en fait brûler un en hiver à proximité d'un buisson de pin nain recourbé, tordu pour son hibernation, il se redresse. Le feu s'éteint, et le conifère déçu se courbe à nouveau avec des larmes de dépit et se couche au même endroit.

                Et la neige l'ensevelit.

                Non, il n'est pas seulement le prophète du temps. Le pin nain est l'arbre de l'espoir : c'est l'unique arbre à feuilles persistantes de tout le Grand Nord. Dans la neige blanche étincelante, sa ramure d'aiguilles vert mat dit le Sud, la chaleur, la vie. L'été, il est modeste et passe inaperçu : tout fleurit aux alentours avec vélocité pour tâcher d'atteindre un plein épanouissement pendant le bref été du Nord. Les fleurs du printemps, de l'été et de l'automne se chassent les unes les autres en une impétueuse floraison. Mais l'automne approche, et tombent les petites aiguilles jaunies qui laissent les mélèzes à nu, l'herbe des champs se pelotonne et se dessèche, la forêt se dénude et on peut alors apercevoir sur l'herbe jaune pâle et sur la mousse grise le flamboiement des grandes torches vertes de pin nain.

                J'ai toujours considéré le pin nain comme l'arbre russe le plus poétique, bien plus que le saule pleureur tant vanté, que le cyprès ou le platane. Et ses bûches donnent davantage de chaleur.

                 

                 

                Bien amicalement,

                Ahikar

                #155312
                PommePomme
                Participant

                  Mais alors… votre texte, Ahikar, n'est pas un “hommage”: c'est un plagiat.

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