N’écris pas! Je suis triste, et je voudrais m’éteindre;
Les beaux étés, sans toi, c’est l’amour sans flambeau.
J’ai refermé mes bras qui ne peuvent t’atteindre;
Et frapper à mon coeur, c’est frapper au tombeau.
N’écris pas!
N’écris pas!N’apprenons qu’à mourir à nous-mêmes,
Ne demande qu’à Dieu…qu’à toi, si je t’aimais.
Au fond de ton silence écouter que tu m’aimes,
C’est entendre le ciel sans y monter jamais.
N’écris pas!
N’écris pas!Je te crains; j’ai peur de ma mémoire;
Elle a gardé ta voix qui m’appelle souvent.
Ne montre pas l’eau vive à qui ne peut la boire,
Une chère écriture est un portrait vivant.
N’écris pas!
N’écris pas ces deux mots que je n’ose plus lire;
Il semble que ta voix les répand sur mon coeur,
Que je les vois briller à travers ton sourire;
Il semble qu’un baiser les empreint sur mon coeur.
N’écris pas!
texte paru en 1948 dans “La lyre d’Orphée_ Les plus beaux Poèmes Français” ouvrage publié par les presses universitaires de France